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Déclaration du 14 janvier 2022

Déclaration du 14 janvier 2022

Nous rendons aujourd’hui hommage aux martyrs de la révolution et nous nous engageons, avec nos militantes, nos camarades et les femmes tunisiennes, à continuer la lutte avec autant de persévérance et de défi pour éradiquer le système patriarcal sous ses différentes formes
oppressives et réactionnaires, d’où qu’elles viennent.
L’Association Tunisienne des Femmes Démocrates s’est résolument engagée, depuis sa création dans l’arène politique et sociale, partant de ses principes fondamentaux et persuadée qu’il n’y a pas de droits des femmes sans la garantie des libertés collectives et individuelles.
L’association a milité côte à côte avec toutes les forces progressistes pour la réalisation de la démocratie et la garantie de la civilité de l’Etat, sous le slogan historique : « Pas de démocratie sans droits des femmes et sans égalité, et pas de citoyenneté effective pour les femmes en l’absence des libertés » 

Nous commémorons aujourd’hui le onzième anniversaire de la révolution de la liberté et de la dignité dans un contexte de crise politique, économique et sanitaire où certains acquis démocratiques, constitutionnels et féministes sont menacés. Au cours de ce parcours sinueux, les droits des femmes ont connu des heures de gloire, comme des moments d’échec, en commençant par le déclenchement du processus révolutionnaire en 2008, en passant par le 17 décembre 2010, en arrivant au 14 janvier 2011, avec la chute du régime oppressif de Ben Ali, pour couvrir toute la décennie passée. L’association a ouvert ses portes et accueilli les révolutionnaires, les a accompagné.e.s dans leurs revendications légitimes, partagé avec elles et avec eux le rêve de la révolution en faisant face à toutes les formes d’oppression, de discrimination, de racisme et d’exploitation, de même qu’elle a accompagné les femmes victimes de violences, de marginalisation et d’exclusion et soutenu les familles des martyrs et des blessé.e.s de la révolution.

« Libertés, libertés face à toutes les régressions ! »
L’association Tunisienne des Femmes Démocrates a lutté contre le courant réactionnaire sous toutes ses formes durant toute cette décennie et a réalisé avec ses partenaires des acquis dont la constitutionnalisation du principe de l’égalité entre les sexes, l’obtention de la parité dans la loi électorale, sans oublier les efforts déployés dans la sensibilisation et le plaidoyer pour l’élaboration de la loi n°58-2017, relative à l’élimination des violences à l’égard des femmes et des filles et de la lutte contre la discrimination basée sur le genre et la race.
L’association continue de militer pour obtenir l’égalité totale dans l’héritage et la révision du Code du Statut Personnel afin de lever la tutelle patriarcale au sein de la famille et pour l’égalité totale dans les droits et les devoirs. Face à la perpétuation des mêmes politiques discriminatoires, notre lutte continue par le biais des campagnes de plaidoyer et de mobilisation pour l’application des conventions internationales qui garantissent les droits des femmes dans tous les domaines socio-économiques comme l’égalité dans l’héritage, le transport convenable et digne pour les travailleuses agricoles et le travail décent pour les aides ménagères, ainsi que le droit des femmes à la propriété et au partage juste et égalitaire des ressources.

« Egalite, égalité pour les femmes et les régions »
L’association Tunisienne des Femmes Démocrates n’oublie pas la souffrance des femmes des régions due, entre autres à la rareté de l’eau et au manque d’accès aux services les plus fondamentaux ainsi qu’à l’augmentation des taux de chômage dans leurs rangs et l’absence de stratégies de développement inclusives. L’association a œuvré également pour la garantie d’un cadre légal pour en finir avec les injustices et la discrimination. Aujourd’hui, le gouvernement d’exception sape le droit à l’accès égalitaire au travail pour les femmes, sur la base d’un décret-loi gouvernemental qui annule l’égalité des chances des critères de recrutement pour la fonction publique et interdit les augmentations salariales. Ce même décret-loi a été précédé par la loi de finances 2022, qui alourdit la fiscalité et les intérêts bancaires que les tunisiennes et les tunisiens auront à payer, ce qui aura pour conséquences, une plus grande féminisation de la pauvreté d’une part, et la paupérisation de la classe moyenne, déjà largement entamée, d’autre part. En contrepartie, avec l’article 66 de la Loi de finances relatif à l’amnistie, qui propose un impôt libératoire de 10% à toutes les personnes physiques aux fortunes et aux revenus inconnus, l’Etat s’est attelé à blanchir les fraudeurs, et les délinquants fiscaux de tout bord.

« Nous nous sommes rebellé.e.s ensemble pour construire ensemble »
Et parce que nous voulons construire ensemble, l’Association a revendiqué son droit constitutionnel à la participation et à l’élaboration/conception du devenir commun. Elle y a apporté sa contribution par l’élaboration d’un mémorandum féministe commun, dans lequel elle a revendiqué, avec ses partenaires, une approche participative, la justice sociale, et la défense des libertés, de la démocratie et des fondamentaux de l’Etat civil. Toutefois, l’accaparation des pouvoirs législatifs et exécutifs par le Chef de l’état, n’a laissé aucune marge de participation devant la société civile pour assumer son rôle et ses responsabilités de défense de l’Etat de Droit et des institutions et pour avancer des propositions et des alternatives concrètes, capables d’aider à surmonter la crise actuelle.

« Nous n’oublions pas et ne compromettons pas nos droits et libertés »
Le 14 janvier 2011 revêt, pour nous, une symbolique historique qui marque la chute du régime autoritaire et constitue une partie indivisible du projet politique et économique de la révolution de la liberté et de la dignité, tel qu’il a été élaboré par l’agora révolutionnaire. Le mouvement féministe a été partie prenante de cette agora révolutionnaire et a activement participé à la chute de l’autoritarisme et de l’oppression et pour l’avènement d’un Etat de Droit, qui garantisse l’égalité et les droits, sans discrimination aucune, conformément aux principes des droits humains, dans leur universalité et globalité. Nous commémorons cette date, tandis que nous traversons une crise économique et sanitaire inédite, aggravée par une crise politique et un pouvoir populiste, qui fait peser de sérieuses menaces sur les libertés individuelles et collectives, l’état de droit, la liberté d’expression et de manifestation, et induit l’immixtion de l’institution sécuritaire dans les affaires politiques.
De telles pratiques à l’égard du droit des citoyennes et citoyens aux manifestations pacifiques, à la liberté d’expression et à l’opposition politique, ainsi que l’agression des manifestants, nous rappelle les pratiques du système autoritaire et celui de l’islam politique qui ont échoué face à l’attachement des mouvements des jeunes, de la société civile et des forces vives aux acquis de la démocratie et des droits humains. Cet acharnement du président de la république à s’accaparer les pleins pouvoirs et la gestion unilatérale de la sphère politique et sécuritaire ne menace pas seulement les acquis démocratiques et civils, mais fait le jeu de l’islam politique, que la population a catégoriquement rejeté et auquel les mouvements démocratiques et féministes, se sont farouchement opposés, présageant l’instauration d’un
système despotique et autoritaire.

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